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RECIT
l’histoire aurait alors pu se résumer à un abandon, Après huit ans d’arrêt et seulement cinq mois de
sur lequel il s’agirait simplement de rebondir, préparation, je vais prendre le départ du 12ème
s’il n’avait donné lieu à cette « première fois ». La IronMan France.
première fois où, quelques heures plus tard, je
t’entendais au téléphone, effondré, en sanglots. 5h15, j’arpente la longue allée du parc vélo, il fait
Toi mon fils, qui depuis le jour de ta naissance, où encore sombre, mais il fait doux. Seuls les sons
la vie t’a privé d’une mobilité « normale », n’a jamais brefs des pneumatiques qui retrouvent quelques
simplement pleuré. Ce jour là aussi, tu me suivais goulées d’air sonnent entre les allées. Un calme
déjà sur ton écran et je l’ignorais. Comme le signal spécial flotte au dessus des 2500 vélos qui ont
de l’avion en perdition s’éteint spontanément sur le passé la nuit là. Je ne connais personne, mais
radar, tu as perdu ce jour là ma « trace » sans raison, les masques sur tous ces visages, eux, me sont
sans explication sur le tapis du 20ème kilomètre. familiers. Concentrés pour certains, les regards
Plus rien. Les champs suivants resteront vides. qui se croisent pour d’autres, des « potes de club»
Ta détresse et tes pleurs angoissés ont aggravé la qui s’embrassent et tentent quelques pointes
blessure, et gagné mon âme ce jour-là. J’ai laissé d’humour, comme pour se rassurer, des sourires
vingt-deux kilomètres, sur le bord de la route, il timides, je les reconnais, rien n’a changé. Je
y a huit ans. Je suis revenu les chercher pour toi, remplis mes bidons, vérifie le braquet de départ et
et pour chasser mes démons. Huit ans que je vis l’accrochage du vélo sur le rack, force un dernier
avec, qu’ils ne m’ont pas lâché. coup d’air dans les pneumatiques et dans la «bulle»
qui s’agrandit et se renforce encore un peu plus.
J’enfile le bas de la combinaison néoprène, je fixe
la puce à la cheville et je vide mon mug de café. J’aime être prêt tôt et prendre quelques minutes
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