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bien, qu’elles ne l’auraient pas fait aux Jeux ou sur une
        grande finale de la WTS ! Et l’objectif était de se qualifier
        pour les JO un an après, pas forcément de gagner…

        Ce geste est spontané, décidé en une fraction de seconde
        et manque-t-il de respect aux autres concurrentes ? A
        l’éthique ? Aux spectateurs ? Non, et je le trouve beau
        et plutôt chevaleresque à l’heure où certains coéquipiers
        sont d’abord et surtout des rivaux. La fédération
        internationale a préféré une application de ce règlement
        idiot. Le triathlon, dont on parle peu dans les médias
        généralistes en a fait la une ou presque dans ces mêmes
        médias…La Croix, L’Express, Cnews, France 2, BFM et
        dans comme cela dans tous les pays…Tout ça pour
        donner du triathlon l’image d’un sport procédurier et qui
        n’accepte pas une dose d’humanité et qui demande à
        ses « sujets » de marcher droit ! Peut-il se permettre en
        termes d’image ? Je ne le pense pas. Sur cette question,
        je finirai par les mots d’un champion qui incarne le sport
        comme je l’aime, Kilian Jornet. Sur Twitter, voilà comment
        l’Espagnol a réagi à la décision de l’ITU : « Beaucoup de
        fédérations voient le sport comme un spectacle à vendre en
        oubliant que ce sont les athlètes qui le pratiquent, pas les
        spectateurs ni les fans. Heureusement, ces gestes peuvent
        contribuer à changer les règles. » Puisse Kilian être entendu.

        La deuxième image qui m’a marqué, touché et ému n’est
        d’ailleurs  pas  une  image  mais  un  récit.  Le  récit  d’une   « A une époque où la démesure est devenue banale,
        aventure  humaine  comme  je  les  aime,  aux  antipodes   l’EmbrunMan a su garder son âme et continue de faire rêver.
        d’une décision injuste et sans humanité. Il s’agit du post   Depuis 1984, chaque mois d’août, l’histoire du mythe s’écrit.
        de mon vieil ami Pascal Grégoire Boutreau racontant son   Cette année, je vais tenter d’en écrire un petit chapitre même
        Embrunman sur son blog «l’esprit du sport». Pardon,   si je ne suis qu’une minuscule ligne sur une start list. (…) Des
        pour ceux qui ont l’habitude de me lire, si je radote un peu,   meilleurs qui finiront leur périple dans à peine 10 heures, aux
        mais vous connaissez mon amour inconsidéré pour cette   plus anonymes dont la seule ambition est de passer la ligne
        course. Pour moi, Embrun a été un choc, un rêve et le   d’arrivée avant ce soir, 23h15. Je suis de ceux-là.
        plus beau défi qui soit. Et même si je n’y suis pas revenu   Il est 22h02 en ce jeudi 15 août. Au milieu des étoiles,
        depuis longtemps, l’Embrunman est là, comme un repère.   la  Lune  a  fait  son  retour.  Comme  pour  nous  guider.  Je
        Chaque 15 août. Une institution qui ne change pas… Un   suis «EmbrunMan». Une médaille, un polo finisher pour
        pilier. Au delà des quelques élites qui prennent le risque   matérialiser les émotions d’une journée. Mais surtout des
        de cramer leur saison en osant s’y attaquer, Embrun,   souvenirs pour une vie. Souvenirs de sensations uniques,
        ce sont ces amateurs, comme Pascal. Ces inconnus qui   difficilement descriptibles avec des mots. Bien sûr, il y eut des
        selon moi, incarnent le triathlon, le font vivre et en font un   moments difficiles. Mais jamais de souffrance. Jamais je ne
        sport magnifique, un idéal, un défi juste pour se prouver   me suis demandé ce que je faisais là.
        qu’on peut aller au bout. Un sport sans fric et un partage.   L’aventure EmbrunMan est terminée. Elle est une nouvelle
        Tout le contraire de la décision prise au Japon. Le triathlon   illustration qu’il faut oser rêver grand. Que si l’on s’en donne
        c’est eux, pas l’ITU. Ils s’appellent Pascal, Cécile, Franck ou   les  moyens,  ces  rêves  qui  parfois  semblent  fous,  peuvent
        Cathy. Ils se préparent toute l’année entre midi et deux,   devenir réalité. Le temps file, les années passent, alors ne
        le soir après bosser, le week-end, passent leur temps à   laissez pas les  «j’aimerais un jour» devenir des «j’aurais aimé
        jongler entre le boulot, leur famille et cet entrainement   un jour». Il faut croire en soi. Nous sommes toutes et tous
        parfois indigeste pour avoir le droit d’être au départ à 6   capables de réaliser des choses qui sortent de l’ordinaire. Ne
        heures du matin sur les rives du lac de Serre-Ponçon.   laissez pas les autres vous convaincre du contraire. »
        Ils vont au bout ou pas, peu importe mais ils mettent en
        avant des valeurs. Et nous font rêver tous les ans. Treize   Que dire de plus ? Juste que la lecture de ces lignes m’a à
        ans après avoir écrit le mien, je me suis retrouvé dans le   nouveau montré pourquoi j’aimais tant ce sport.
        récit de PGB. Si touchant, si juste et si vrai.      Au delà d’un classement ou d’une perf, il s’agit de la vie,
                                                             de nos vies, du temps qui passe et de faire ce que l’on
                                                             juge bon, pour soi pour s’affranchir des règlements idiots
                                                             et de ceux qui n’ont rien compris. Juste être libre.


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