Dossier paru dans TrimaX-magazine n°237 – mai 2024 / article : Simon Billeau, photos : DR
Les roues jouent un rôle majeur dans la performance d’un vélo. Mais selon le type de votre vélo (route ou triathlon), la typographie des épreuves auxquelles vous participez et votre niveau, le modèle le plus adapté à vos besoins peut beaucoup différer. Voici donc de quoi vous aider à faire votre choix.
C’est en comprenant comment fonctionne une paire de roues et son incidence sur la performance que l’on peut faire un choix réfléchi. Commençons d’abord par décrire les composants d’une paire de roues. La jante, le moyeu et les rayons sont les 3 éléments qui déterminent les spécificités d’une roue.
La jante
La première question à vous poser lors de l’achat d’une paire de roues concerne la hauteur de jante (ou profil). Celle-ci varie généralement de 20 à 100 mm. Plus une jante est haute, plus elle est lourde, mais aussi plus aérodynamique qu’une jante basse. Elle est plus difficile à mettre en mouvement ou pour accélérer, mais elle affiche une meilleure conservation de l’énergie à vitesse constante sur un terrain plat. Un point important aussi est qu’il faut composer avec des difficultés à rester en position aérodynamique en cas de fort vent latéral.
À l’inverse, plus la jante est basse, plus elle est légère et nerveuse, mais aussi confortable grâce à des rayons plus grands conférant davantage de souplesse à l’ensemble. Elle se met en mouvement beaucoup plus vite qu’une roue haute, mais requiert plus d’effort pour maintenir une vitesse constante.
« Si vous en avez les moyens, avoir 2 paires de roues est judicieux (…) une paire de roues polyvalentes genre 50 mm de hauteur (…) et une paire de roues pour la performance comme une roue haute à l’avant et une roue lenticulaire à l’arrière. »
Si la légèreté et la réactivité sont des éléments primordiaux en montagne, l’inertie générée par le poids de la jante s’avère utile en plaine où une vitesse constante est importante. Ainsi, sur des épreuves roulantes, on privilégiera des jantes aérodynamiques au profil haut et sur les épreuves montagneuses, il est important de penser à économiser ses ressources en énergie. Une paire de roues polyvalentes ou basses est à considérer.
En termes de sécurité, avoir une paire de roues plus stable et plus facile à arrêter est un plus énorme. C’est la raison pour laquelle, si vous en avez les moyens, avoir 2 paires de roues est judicieux. L’idéal est d’avoir une paire de roues polyvalentes, genre 50 mm de hauteur, qui pourra être utilisée à l’entraînement comme en compétition, et une paire de roues pour une performance ultime comme une roue haute à l’avant et une roue lenticulaire à l’arrière.
Autrefois, lorsque les vélos de triathlon étaient tous en frein à patins, nombre d’entre nous utilisaient des roues en aluminium à l’entraînement car elles étaient plus abordables financièrement. Cependant, l’un des inconvénients d’utiliser des roues en aluminium à l’entraînement et en carbone en compétition était d’avoir à changer les patins de frein. Sur un vélo de route, on ne rencontrait pas trop de problèmes. En revanche, sur les vélos aéro où l’intégration des composants est optimisée pour réduire la résistance aérodynamique, cela signifie que l’accès aux patins de frein est souvent difficile (capot aérodynamique à démonter au niveau de la fourche, pédalier à démonter pour avoir accès à l’étrier de frein au niveau du boitier de pédalier). C’est toujours le cas sur les vélos de triathlon en frein à patins en 2024.
Les triathlètes ont annihilé ce problème en utilisant soit une seule paire de roues qu’elle soit en alu ou en carbone, soit des roues en carbone à l’entraînement et en compétition. Le budget de chacun ici détermine votre choix. Heureusement, avec l’explosion du nombre de marques sur le marché, le prix moyen des roues en carbone a baissé.
« Le frein à disque a permis une amélioration de l’aérodynamisme au niveau de la jante. L’absence d’étrier de frein à patins permet aussi aux fabricants d’élargir leur jante et donc les pneumatiques qu’elles peuvent accepter. »
Aujourd’hui, avec l’avènement des vélos de triathlon en frein à disque, l’inconvénient du remplacement des patins n’existe plus. Il suffit de changer les roues et le tour est joué. Vous pouvez utiliser des roues en alu ou en carbone, aucun risque d’abîmer la jante au niveau de la bande de freinage car elle n’existe pas. Cette modification a permis aussi une amélioration de l’aérodynamisme au niveau de la jante. L’absence d’étrier de frein permet aussi aux fabricants d’élargir leur jante et donc les pneumatiques qu’elles peuvent accepter. Ce faisant, cela a un impact sur la résistance du roulement.
La marque polonaise qui monte, Ron Wheels (lire notre article dans le magazine n°236) offre d’ailleurs de nombreuses combinaisons de paire de roues incluant une lenticulaire avec une roue avant de différentes hauteurs à 1 640€.
Si vous comparez avec des marques prestigieuses, mais pas forcément plus rapides comme Zipp (autrefois numéro 1 des roues comptées au championnat du monde Ironman à Kona), une simple roue arrière lenticulaire vous en coûte presque 2 600 € pour son modèle le moins cher.
Je nuance au niveau de l’efficacité aérodynamique des marques de roues car hormis des arguments marketing connus et éprouvés, les tests aérodynamiques sont majoritairement biaisés et les conditions de réalisation restent cachées. La seule marque à ma connaissance qui effectue ses tests en prenant en compte l’interaction du système dans son ensemble (vélo et triathlete) ainsi que la résistance aérodynamique translationnelle et rotationnelle est Swiss Side de Jean-Paul Ballard. C’est ce même ingénieur qui “design” le profil des roues pour Swiss Side et DT Swiss.
C’est la raison pour laquelle ces roues sont aujourd’hui les leaders du marché en triathlon (décompte du nombre de roues au championnat du monde Ironman hommes à Nice en 2023) et arrivent en tête de chaque test indépendant effectué en soufflerie.
Un site internet en 2022 avait testé 10 paires de roues de même profilé dont DT Swiss, Zipp, Enve, Reserve, Hed, Vision, Roval, Hunt, Shimano et FFWD. DT Swiss avait remporté ce test, mais il convient de noter que la différence en termes de CdA entre DT Swiss et la paire de roues la plus lente “aérodynamiquement” parlant est de
3.87 watts à 40 km/h sur ce test.
Il faudrait aussi tenir compte d’autres facteurs comme le couple de braquage. Cette notion est magistralement détaillée sur le site de DT Swiss. Il s’agit de la répartition des forces latérales sur une jante de roue et ses rayons ou bâtons. En cas de vent latéral, le couple de braquage est asymétrique. Cette asymétrie génère une contrainte autour de l’axe de direction. L’un des objectifs de développement des jantes Swiss Side et DT Swiss était de minimiser cette asymétrie en répartissant uniformément les forces latérales sur la jante en cas de vent latéral.
Le couple de braquage est plus élevé pour des roues à bâtons surtout lorsque le nombre de bâtons en carbone est d’un nombre impair. En effet, lorsque la roue avant est dotée de 3 ou 5 bâtons, à un instant T, la surface de contact des bâtons à l’arrière de la fourche est différente de la surface de contact du ou des bâtons à l’avant de la fourche. Immédiatement après, à l’instant T+1, la surface de contact des bâtons de chaque côté de la fourche s’inverse et donc la maniabilité est compromise. Leur avantage réside dans le fait que ces roues sont très rigides et ont des CdA (coefficient aérodynamique) excellent à des angles d’attaque proches de 0 degrés. Ce sont donc des roues optimisées pour des vitesses élevées.
Ron a d’ailleurs une magnifique roue avant à 2 bâtons, l’Ultron, testée également en soufflerie. Selon leurs mesures, la force latérale agissant sur la jante à un angle de vent de 15 degrés et à une vitesse de vent de 42 km/h est inférieure de 320 g/m2 à celle d’une roue avec un profil de 88 mm dans les mêmes conditions.
On pourrait aussi parler de l’optimisation de l’interaction entre le pneu et la jante. Chez DT Swiss, on recommande sur les excellentes roues ARC DICUT des pneus tubeless de 25 ou 28c. Chez Aerocoach UK, leur AEOX Titan est le plus rapide avec un pneu de 23c. Cela impacte donc la résistance du roulement.
Enfin, pour en finir avec les jantes, il y a la roue ultime que les triathlètes aiment tant : la roue lenticulaire. Outre le son remarquée et remarquable qu’elles produisent, ces roues ont également un gain aérodynamique grâce à l’effet de voile. À certains angles d’attaque du vent, la roue lenticulaire engendre un drag négatif. Concrètement, cela se traduit par une propulsion “gratuite”.
Les rayons
Ils font la jonction entre la jante et le moyeu. Autrefois, ils étaient tous en acier trempé. Aujourd’hui, on voit des marques sortir des roues avec des rayons en carbone comme la marque Scope.
Leur modèle Artech 6 ne pèse que 1 244 g alors que la comparaison chez DT Swiss (les ARC DICUT 1100 62 db) pèsent 1 668 g. Une différence de 400 g notoire. La rigidité des rayons en carbone comparée à l’acier est 10 fois meilleure également.
« S’il y a moins de rayons, la roue est plus efficace aérodynamiquement. »
Cette rigidité accrue permet de réduire le nombre de rayons (16 chez Scope, 20 chez DT Swiss et 24 chez la majeure partie des fabricants). S’il y a moins de rayons, la roue est plus efficace aérodynamiquement.
Le leadership de DT Swiss est multifactoriel. L’un des facteurs réside dans le fait que les écrous des rayons sont internes à la jante alors que la majorité des concurrents ont des écrous externes. Or, la vitesse de rotation au niveau des écrous des rayons est deux fois supérieure à la vitesse de déplacement.
Les moyeux
DT Swiss, encore une fois, est renommé pour son système à couronnes dentées. Il est facile d’entretien car il ne nécessite pas d’outils. Le nouveau moyeu 240 EXP est plus léger, plus durable et comprend moins de pièces. Les roulements sont en céramique, ce qui confère encore une amélioration de la friction des billes dans les cuvettes des roulements.
Le système à couronnes dentées est souvent perçu comme plus fiable et plus durable car toutes les dents sont sollicitées lors du pédalage. Sur le système à cliquets, seuls les cliquets (3 à 6 selon les marques) en prise avec la couronne dentée transmettent l’effort de pédalage. Malgré tout, il est possible de trouver d’excellents moyeux qui utilisent l’une ou l’autre des 2 solutions. La fiabilité et la durée de vie de la roue libre dépend avant tout de la qualité de fabrication mise en œuvre.
Pour une paire de roues DT Swiss ARC Dicut db (pour Disc Brake), il faut compter 2 388 €. Comme nous vous l’avons indiqué auparavant, malgré la qualité indéniable de DT Swiss et leur supériorité sur la concurrence, il faut garder à l’esprit que la différence de performance est à relativiser. Si votre pratique est plus orientée loisir que performance, il est peut-être judicieux d’économiser quelques centaines d’euros, de vous offrir une paire de roues plus abordable ou peut-être mettre ces économies à profit en faisant une étude posturale ou un test en soufflerie qui vous permettra d’améliorer notablement votre confort et votre aérodynamisme.
Chez Trimax Magazine, on vous encourage à soutenir le tissu local et le Made in France. La seule soufflerie en France est basée à Magny-Cours. Les experts d’Aeroptimum sauront vous guider pour optimiser votre performance. Une visite chez Aeroptimum permet d’avoir des certitudes sur votre position qui concourt à 75% de la résistance aérodynamique totale. Par ailleurs, ils ont une large gamme de casques aérodynamiques à l’essai. Or, le casque comme les roues ont un rôle prépondérant dans l’aérodynamisme car ils sont les premiers composants en contact avec l’environnement.