Article paru dans le magazine 217 _juin 2022 / Rédigé par Jean-Baptiste WIROTH – PhD, Docteur en Sciences du Sport et Fondateur du réseau de coach WTS (www.wts.fr

La tendinite fait partie des pathologies les plus fréquemment rencontrées chez les sportifs. En effet, rares sont les athlètes qui n’ont pas eu à soigner une tendinite un jour ou l’autre. Blessure pénalisante, elle est souvent l’épée de Damoclès au-dessus de la tête des sportifs d’endurance, et des triathlètes en particulier qui “cumulent” 3 disciplines. Comment la guérir quand elle survient ? Comment la prévenir pour l’éviter ? “Détendez-vous”… Nous vous livrons quelques éléments de réponse.

Qu’est-ce qu’une tendinite ?

La tendinite est une inflammation du tendon, structure fibreuse qui rattache le muscle à l’os.  Elle est principalement causée par des contraintes musculaires excessives ou bien un matériel inadapté. Dans ce dernier cas, on parle de technopathie puisque c’est le matériel qui est à l’origine de la pathologie. En cas de tendinite, le tendon est enflammé, rétracté, gonflé et douloureux. Le traitement peut s’avérer assez long et laborieux.

Les principales tendinites

En natation, ce sont les tendinites de l’épaule et du coude qui sont les plus fréquentes. En effet, les innombrables répétitions d’un mouvement pas si naturel que cela (le crawl) peut engendrer des troubles muscla-tendineux particulièrement complexes à traiter. Il vaut donc mieux prévenir les problèmes !

En vélo, la tendinite rotulienne (sous la rotule) est classique des sur-sollicitations. Les tendinites de la pâte d’oie (intérieur du genou) et du tenseur du fascia-lata (extérieur du genou, aussi appelé syndrôme de l’essuie-glace) sont très souvent liées à un mauvais réglage des cales (talon trop vers l’intérieur ou trop vers l’extérieur) ou à un système de pédales qui ne laisse pas assez de liberté angulaire.

En running, la tendinite du talon d’Achille est classiquement liée à une sur-sollicitation des muscles jumeaux (mollets). Le syndrome de l’essuie-glace (extérieur du genou) est un classique chez les coureurs.

Les “petites” tendinites font souffrir au repos et disparaissent à l’effort faible à modéré. Les tendinites sévères font souffrir en permanence, y compris au repos et a fortiori à l’effort.

« La progressivité dans l’augmentation de la charge de travail reste encore le maître mot de la prévention. »

Les causes

Première cause des tendinites : un entraînement trop intensif et/ou pas assez progressif ! L’exemple classique en natation est l’utilisation des plaquettes : bien souvent, une introduction trop rapide de plaquettes dans l’entraînement d’un nageur débutant peut contribuer à générer une contrainte excessive qui se traduit par l’apparition de tendinite de l’épaule. Les tendinites peuvent aussi se déclarer à l’issue d’efforts trop intenses pour lesquels le triathlète est insuffisamment préparé. Cela peut être un entraînement très long ou une compétition particulièrement dure.

La progressivité dans l’augmentation de la charge de travail reste encore le maître mot de la prévention. Sans progressivité, tous les problèmes anatomiques mineurs (jambe plus courte que l’autre, déséquilibre du bassin…) peuvent alors faire le lit des tendinites lorsque la charge d’entraînement augmente trop rapidement.

Seconde cause des tendinites : l’utilisation d’un matériel inadapté comme des plaquettes trop grandes en natation, un vélo mal réglé, ou des chaussures mal choisies.

En vélo, le matériel et/ou une mauvaise position sur le vélo est d’ailleurs à l’origine de la majorité des tendinites, et les articulations de la jambe sont les plus touchées (genou, cheville). Cela résulte souvent d’un problème au niveau du point d’appui inférieur (pédales) ou supérieur (selle). Les principales causes sont :

  • une selle trop haute ou trop basse
  • une selle qui penche trop en avant ou trop en arrière
  • une selle desaxée ou tordue (au niveau des rails)
  • un cintre trop bas ou tordu
  • un axe de pédale ou de pédalier tordu
  • une cale de chaussure mal réglée (pédales automatiques)…

Les tendinites peuvent aussi survenir suite à une chute, entraînant un traumatisme musculo-tendineux ou un déplacement osseux. Parmi les “classiques”, on retrouve les déplacements de la colonne vertébrale ou du bassin qui engendre des tensions musculaires “en cascade” jusque’à l’articulation concernée. On parle alors de tendinite de “compensation”.

Enfin, il faut savoir que l’utilisation de certains antibiotiques peut augmenter de manière très significative le risque de survenue de tendinite. Les antibiotiques en question sont les fluoroquinolones, souvent utilisés pour les infections ORL ou urinaires (Marque : péflacine, Ciflox, Oflocet, Zagram). N’hésitez pas à en parler à votre médecin du sport et/ou votre pharmacien si vous avez un doute.

« Matériel, échauffement, hydratation et nutrition, hygiène bucco-dentaire, posturologie, renforcement… sont les piliers de la prévention des tendinites. »

La prévention

Voici 5 conseils visant à prévenir l’apparition des tendinites :

  1. Le matériel. En natation, pas de plaquettes avant au moins 1 saison d’entraînement régulier. En vélo, soignez les réglages relatifs à la position sur votre vélo en ayant recours à un spécialiste de l’ergonomie. En course à pied, prenez le temps de bien choisir vos chaussures de running avec un spécialiste.
  • L’échauffement. Il est indispensable (20-30 min) surtout s’il fait froid (facteur favorisant la tendinopathie). Pour qu’une structure musculo-tendineuse fonctionne de manière optimale, il est nécessaire que la température augmente pour que le complexe articulation/muscle/tendon soit prêt à l’effort. En natation, commencez donc vos séances par 5-10 minutes de mobilisation articulaire. Insistez sur le renforcement des muscles rotateurs externes d’épaule (infra-épineux et petit rond) réalisant l’action opposée aux muscles propulseurs (grand pectoral et grand dorsal)  pour améliorer leur efficacité freinatrice. En vélo, moulinez sur le petit plateau pour soulager vos genoux ! 
    En vélo, évitez de rouler en force, et préférez la vélocité (cadence de pédalage > 70 rpm en côte et >90 rpm sur le plat). En course à pied, débutez vos séances par 5-10 minutes de mobilisation articulaire. Ensuite, essayez de réduire l’impact de la foulée en déroulant le pied, voire en attaquant par la pointe de pied.
  • L’hydratation et la nutrition. Les tendons sont des structures fibreuses très sensibles à l’état d’hydratation de l’organisme. Il convient donc de s’hydrater très régulièrement par petites quantités pour prévenir les tendinites, en particulier en période estivale !
    Il faut s’hydrater suffisamment en eau toute la journée. (un signe simple, les urines doivent être claires). La quantité dépend de l’activité et de la température (entre 1,5 et 3L). Si vous êtes sensible aux tendinites, essayez de réduire les aliments acidifiants comme, l’alcool, le café ou le thé noir, la viande rouge, les fromages. les produits laitiers de la vache, les sodas, les sucreries. À l’inverse, il convient d’augmenter les aliments alcalins c’est à dire principalement les fruits et les légumes, les graisses riches en Oméga-3 (maquereau, sardines, saumon ou huiles de colza et de noix).
  • Les dents. L’hygiène bucco-dentaire est importante en prévention et pour le traitement d’une tendinite. Les experts sont unanimes pour dire qu’une mauvaise hygiène dentaire (caries ou autres) est une porte d’entrée d’infections pour l’organisme. Un bilan dentaire annuel est indispensable ! En outre, sachez que la plupart des “boissons de l’effort” ont un pH très acide, les dentistes conseillent aux sportifs de bien se rincer la bouche avec de l’eau pendant l’effort, et de se brosser les dents au retour de l’entraînement.
  • Posturologie et ostéopathie. En cas de déséquilibre postural, les chaînes musculaires sont mises en tension de façon déséquilibrée. Avec l’entraînement, un surmenage s’instaure jusqu’à pouvoir déclencher des lésions tendineuses. La porte d’entrée peut être une cicatrice proéminente, une asymétrie occulaire ou mandibulaire, un problème de statique au niveau des pieds… Consultez un posturologue pour entamer un travail de fond. Et n’hésitez pas à consulter un ostéopathe à intervalles réguliers, en particulier si vous avez chuté récemment. C’est le passage au “marbre” du sportif ! 
  • Enfin, le renforcement musculaire peut grandement contribuer à améliorer la capacité de résistance des tendons (stiffness), induisant de meilleures propriétés bio-mécaniques lorsque la vitesse ou la distance augmente.
     

Le traitement

La première étape du traitement consiste à faire un examen clinique avec un médecin du sport. C’est une étape incontournable pour exclure tout autre problème.

La second étape, complémentaire à l’examen clinique initial, repose sur l’imagerie médicale avec un praticien expérimenté : échographie et IRM

Un fois le diagnostic établi, le traitement peut reposer sur de nombreuses techniques différentes :

  • La physiothérapie
  • L’electrostimulation
  • Etirements et renforcements selon la méthode Stanish
  • La mésothérapie
  • Les massages transverses profonds
  • Les ondes de chocs
  • L’injection de PRP (platelet rich plasma) à partir du sang du patient
  • L’injection d’acide hyalorunique… etc

L’un des objectifs des traitements est de favoriser le flux sanguin dans le tendon lésé afin de drainer les fibres enflammées tout en leur apportant des nutriments, de l’eau et de l’oxygène. Ce drainage est aussi favorisé par le maintien d’une activité physique adaptée qui sera extrêmement bénéfique pour récupérer rapidement. L’entraînement “adapté” ne doit pas générer de douleur dans la zone blessée. 

Conclusion`

Si vous êtes sujet aux tendinites, soyez extrêmement progressif dans l’introduction de nouveaux matériels et prenez soin de vos tendons à des fins préventives. Si la tendinite apparaît, alors il convient de ne pas “forcer” sur la douleur. Celle-ci doit être appréhendée comme un signal d’alarme  qui doit vous inciter à “lever le pied” et à vous reposer !  Si vous n’avez jamais eu de tendinites, alors vous êtes chanceux. Gardez néanmoins en mémoire qu’il faut toujours utiliser un nouveau matériel avec progressivité (nouveau vélo, nouvelle chaussures, nouvelles plaquettes …).

Références

  • Effect of aging and exercise on the tendon. Svensson RB et al., J Appl Physiol (1985). 2016 Dec 1;121(6):1237-1246.
  • Optimizing strength training for running and cycling endurance performance: A review. Ronnestad BR, Mujika I. Scand J Med Sci Sport 2014 Aug;24(4):603-12.