Article paru dans le magazine 214 _mars 2022 / Rédigé par Simon Billeau
Comme beaucoup d’entre nous peuvent en témoigner, la course à pied est un sport difficile et usant. On a souvent le souffle court. On est parfois pris de crampes musculaires et/ou intestinales. On a les jambes lourdes. Il est parfois difficile de croire que nous sommes nés et “construits” pour cette activité. Et les chiffres semblent étayer cette conclusion : seulement 8 % des calories brûlées pendant la course entraînent réellement une progression vers l’avant. Le reste est soit gaspillé, soit utilisé pour thermoréguler. Le travail de la foulée, et notamment l’attaque pointe ou médio/pied, peut réduire ce “gaspillage”. Zoom sur les chaussures FBR, qui du fait de leur conception, empêchent la fameuse attaque talon.
Le “gaspillage” intervient constamment, mais l’atterrissage du pied est le moment où le corps perd beaucoup d’énergie inutilement. Cet atterrissage coûte de l’énergie, car les muscles de la jambe avant absorbent l’impact. Ce processus se répète encore et encore : décollage, atterrissage, décollage, atterrissage, avec seulement un petit pourcentage de l’énergie dépensée allant vers l’avant.
Il existe 3 types de coureurs au niveau de l’attaque du pied:
- ceux qui attaquent par le talon
- ceux qui attaquent par la plante du pied
- ceux qui attaquent par l’avant-pied
Il a été maintes fois démontré que les coureurs attaquant par le talon sont plus sujets à des blessures des membres inférieurs. Cela est en partie dû a un impact transitoire plus élevé pour ces coureurs et un temps de contact au sol plus long ce qui engendre des pressions et contraintes sur les articulations plus importantes.
Notez que des méta-analyses qui regroupent l’ensemble des études à ce sujet ne sont pas aussi tranchées que je le suis. Mais si l’on regarde les caractéristiques des participants et que l’on sélectionne uniquement les études avec des coureurs d’un niveau élevé, la donne est bien plus précise. Pour faire simple, plus vous êtes un coureur confirmé, plus vous ferez statistiquement partie d’un groupe de coureur soit ‘’plante de pied’’ soit ‘’avant-pied’’.
C’est basé sur ce constant qu’un entraîneur, Franc Beneyto, d’Alicante en Espagne, a eu l’idée de fabriquer des chaussures sans talons ! L’idée peut paraître saugrenue, mais une fois que l’on met de côté l’aspect esthétique et peu orthodoxe lorsqu’on y réfléchit, le design est novateur.
Le fait de retirer le talon ne laisse pas la liberté à son utilisateur d’attaquer par le talon. Directement, le coureur ne peut que transformer sa technique en une pose du pied par la plante. Le fait d’atterrir sur la plante des pieds permet d’emmagasiner l’énergie élastique et cette énergie est restituée lors de la propulsion, alors que cette énergie “gratuite” est perdue lorsque l’on attaque par le talon. Ces résultats ont été obtenus après 5 années de recherche et développement par une équipe de spécialistes en biomécanique, podologues, et physiothérapeutes dans les universités de sheffield Hallam et l’université de Valence. Les résultats ont été présentés au monde scientifique lors du 8e Congrès mondial de biomécanique à Dublin en 2018 et lors de la 33e conférence internationale de biomécanique à Poitiers en 2015.
Côté description, ces chaussures ont un amorti conséquent de 32 mm d’épaisseur. Après, 1 mois de test, je n’ai décelé aucun signe d’un usage prématuré. La page facebook de FBR fait mention de 1000 km sans dégradation.
Ce ne sont évidemment pas les chaussures les plus stables que vous pourrez trouver sur le marché. Sans talon, il va de soi que ces chaussures sollicitent vos muscles pour effectuer le travail de stabilisation, ce qui devrait être le cas naturellement, mais que les équipementiers de chaussures tentent de réduire pour que la pratique populaire soit accessible au plus grand nombre de manière hédoniste. Or, le but de ces chaussures est de vous rendre meilleur !
En comparant ces NOA II avec mes chaussures habituelles pour l’entraînement à basse intensité (les Nike React Infinity), j’ai mesuré les différences de largeur que cela soit à l’avant (115 mm contre 120 mm), au milieu (82 mm contre 61 mm) et à l’arrière (0 mm contre 95 mm). On constate que le but du design des Noa est d’apporter plus de stabilité au niveau de la plante du pied.
Au niveau du poids, les FBR en taille 44 EU pèsent 315 grammes (poids vérifié) ce qui est proche des 290 grammes de mes Nike. Elles ne sont donc pas des chaussures ultra légères dédiées à la compétition selon moi. Mais je vois ce poids comme un avantage pour s’entrainer dur et courir en compétition plus ‘’facilement”…
Question adhérence, j’ai couru sur asphalte et dans des chemins de gravel. Je n’ai pas pu les tester sur route mouillée à ce jour, c’est donc avec une expérience limitée que je peux commenter ce critère. Cependant, le design de la semelle avec ces formes géométriques en diamant de 1.2 mm de profondeur et ces lignes et courbes de 2 mm de profondeur me fait dire que les objets tels que cailloux n’ont que très peu de chance de se coincer dans la semelle.
Ce design me fait en revanche dire que ces chaussures sont très flexibles lors du déroulement du pied sur le sol. La profondeur des formes géométriques améliore la traction et l’adaptabilité du pied au terrain s’il n’est pas totalement plat et lisse.
En termes de réactivité, la semelle à base de polyuréthane nommée “Cush Up Max” est excellente pour absorber le choc à l’impact grâce à ses propriétés visco-élastiques et retransmet l’énergie lors de l’impulsion sous l’effet de la semelle élastique.
« Pour les intensités élevées, les FBR montrent toute leur ingéniosité. La pose du pied se fait à plat ou légèrement sur l’avant du pied. »
Mon test sur le terrain a été révélateur de l’efficacité instantanée que ces chaussures ont sur la technique de la foulée. Aussitôt enfilées, on perçoit la différence de hauteur entre le talon et l’avant du pied. Il est d’ailleurs à ce titre perturbant de marcher normalement avec ces chaussures car on a le talon qui s’affaisse de manière disproportionnée, comme si vous chaussiez des chaussures avec des talons mais ces derniers seraient placés à l’avant des chaussures… En revanche, durant la course à basse intensité, il faut juste garder à l’esprit que l’on court avec des chaussures différentes et qu’il ne faut pas paresseusement attaquer par le talon. Cela est facile à réaliser, que ce soit en montée ou sur le plat. C’est un peu plus difficile en descente car j’ai la mauvaise habitude de me freiner en attaquant par le talon.
Pour les intensités plus élevées, les FBR montrent toute leur ingéniosité. La pose du pied se fait à plat ou légèrement sur l’avant du pied. L’amortissement est suffisant pour l’entraînement et des charges élevées. L’énergie est stockée dans cette semelle et est retransmise lorsque l’on se propulse vers l’avant car elle reprend sa forme initiale.
Pour garder une posture et un alignement vertical de ma hanche, de mon genou et de mon pied, il m’a fallu m’adapter en raccourcissant ma foulée. Par conséquent, pour courir à la même vitesse, il m’a fallu augmenter la cadence. Je suis passé de 168 sur mes footings à 178 SPM ce qui est un avantage dans le but de réduire le coût énergétique de la course et également réduire les blessures. Je ne me sentais pas forcément moins courbaturé les lendemains de séance avec les FBR car le nouveau patron de locomotion demande de l’attention et sollicite musculairement de manière différente.
Personnellement, je pense que ces chaussures sont un outil essentiel à avoir dans sa panoplie de chaussures, comme les chaussures barefoot pour courir pieds nus sans se blesser. Elles permettent de mettre la technique de course à pied au centre des préoccupations. Or, quand on court entre 5 et 42 km, l’efficience est de loin le critère numéro 1.
À 145€, ces chaussures restent abordables. Par ailleurs, il y a souvent des promotions. Jetez un œil sur leur site internet 😉
Pour plus d’infornations: https://fbrconcept.com/en/