C’est le début de la saison. Vos objectifs et courses sont planifiés depuis longtemps (ou pas) et vous y avez associé des programmes d’entraînement (ou pas). Au sein de ces derniers, vous avez probablement aperçu des symboles qui, pour des néophytes, peuvent paraître autant incompréhensibles que des hiéroglyphes de la VIIIe dynastie égyptienne.

Z1, Z2, Z5… késako ? Ce sont les zones de fréquence cardiaque. Exprimées en pourcentage par rapport à une fréquence cardiaque définie, elles vous permettent de cibler vos allures et intensités d’entraînement et compétition. Ok, c’est bien tout ça, mais comment ? Pas de panique ! On vous explique en détail comment les calculer, les appliquer et les respecter, afin de ne pas passer en… zone interdite !

Connaître sa fréquence cardiaque maximale (FCM)… et au repos (FCR) !

FCM (Fréquence cardiaque maximale)

Dans le cadre d’entraînements, sessions ou compétitions de course à pied basés sur des % de fréquence cardiaque, la FCM est la donnée inévitable à posséder. Exprimée en battements du cœur par minute (bpm), c’est la fréquence cardiaque atteinte lors d’un effort maximal et continu. Effort que vous pouvez théoriquement tenir entre 6 et 8 minutes, notamment lors d’un test VMA*.

*VMA : Vitesse Maximale Aérobie : vitesse à partir de laquelle la consommation d’oxygène est maximale (définie le plus souvent sur un intervalle de 6 minutes, couru à vitesse maximale)

Afin de déterminer votre FCM, les tests suivants sont les plus courants :

• Formule d’Astrand : 220 – âge (pour les hommes), 226 – âge (pour les femmes). C’est la méthode la plus connue, la plus simple et la plus rapide. Mais néanmoins basée sur des statistiques, difficilement transposables à titre individuel.

Test terrain : test en côtes (courir “à bloc” sur une pente entre 3 et 5% sur une période de 3 minutes) ou test par paliers (chaque minute, augmentation de 10 bpm, jusqu’à l’échec)

• Test d’effort : encadré par des professionnels, c’est le test le plus fiable. D’autant plus si celui-ci est réalisé sur un tapis de course et non sur vélo. Au-delà de l’aspect performance et capacités, c’est également un test médical fortement recommandé pour les triathlètes avançant en âge (>45), pour un check-up cardio-respiratoire annuel.

Notre conseil : en termes de matériel pour le test terrain, il faudra vous munir d’un cardio-fréquencemètre. De préférence une ceinture cardiaque, la mesure étant effectivement plus juste qu’un cardio poignet, moins sensible aux hautes intensités.

FCR (Fréquence cardiaque au repos)

Vous le verrez par la suite, mais la FCR est tout autant importante que la FCM. Et plutôt simple à calculer ! Vous n’avez qu’à vous vautrer dans votre canapé et prendre votre pouls sur 30 secondes (et multiplier par 2) ou directement sur 1 minute. Facile non ? Oui mais pas n’importe comment Idéalement, il vous faudra prendre cette mesure au réveil, avant toute activité, puis renouveler l’opération sur 2 ou 3 jours afin d’obtenir une mesure crédible, en considérant la plus faible.

Modes de calcul des % de FC

À présent que vous avez fièrement noté sur votre carnet d’entraînement (quoi, vous n’en avez pas ?) vos FCM et FCR, vous allez pouvoir définir vos % d’intensité.

Pour ce faire, vous pouvez choisir une des 3 méthodes suivantes :

• %FCM : pendant de nombreuses années, les communautés de runners et triathlètes ont fonctionné comme ça. En ne prenant en compte que la FCM. Comme un truc gravé dans le marbre ou un des dix commandements. Oui, sauf que pour deux athlètes de même âge, possédant la même FCM, la FCR ne sera pas forcément égale, cette dernière évoluant avec la condition physique, en fonction de l’entraînement. C’est là que le calcul suivant prend tout son intérêt.

• %FC de Réserve : c’est la méthode de Karvonen. Elle repose sur la fréquence cardiaque de réserve, qui est l’amplitude entre la FCM et la FCR :
%FC Réserve => %(FCM – FCR) + FCR

• %FC Seuil lactique : c’est la fréquence cardiaque de limite anaérobie. Quand votre corps accumule plus d’acide lactique qu’il ne peut en éliminer. Résultat super fiable, mais plus fastidieux à obtenir, car il vous faudra faire un test d’effort ou un test de Conconi.

En résumé, en considérant l’exemple d’un triathlète de 44 ans dont la FCM est 188 bpm (en course à pied) et la FCR est 38 bpm, nous pouvons constater les différences suivantes de résultats – non négligeables – selon les méthodes, pour un effort à 80% :

%FCM => 80% x 188 = 150 bpm
%FC de Réserve => 80% x (188-38) + 38 = 158 bpm

Notre conseil : la FCM diminuant avec l’âge et la FCR diminuant avec l’entraînement, la prise en compte de la notion d’amplitude de la méthode Karvonen semble donc la plus précise et la plus adaptée aux spécificités physiologiques de chaque athlète. Ces paramètres étant propres à chacun et évoluant (légèrement) en fonction du type d’entraînement et de l’âge, il sera judicieux de les réévaluer tous les 6 mois à 1 an.

Comme nous l’avons vu précédemment, suivant la méthode de calcul de % retenue, des écarts notables de bpm interviennent, pour un même % d’effort demandé. Ainsi, pour une même fréquence cardiaque cible, il conviendra de considérer les valeurs correspondantes suivantes :

Notre conseil : faites donc attention lorsque vous suivez des plans d’entraînement. Bien souvent, les zones de fréquence cardiaque y sont indiquées pour la FCM seulement. Si vous suivez la méthode de Karvonen basée sur la FC de Réserve, vous devrez donc recalculer les %.

Bon à savoir : %VMA = %FC de Réserve. Il existe effectivement une linéarité entre votre VMA (Vitesse Maximale Aérobie) et votre fréquence cardiaque de réserve. Ainsi, si votre plan d’entraînement précise des séances en % de VMA, vous pouvez vous baser sur votre %FC de Réserve.

Quelle zone pour quel type / quelle durée d’effort ?

En rentrant dans le détail de chaque zone, voici ce que vous allez (plus ou moins) ressentir en terme d’effort :

Z1 : c’est la zone de l’échauffement. Dans cette zone d’effort très
modéré, l’essoufflement sera minime. À ne surtout pas négliger en début de séance pour s’échauffer (ne partez pas comme une balle !) mais également à la fin. En effet, cela vous permettra le “retour au calme” et une meilleure assimilation de la séance, en éliminant les déchets musculaires.

Z2 : la fameuse zone de confort. Typiquement, celle où vous êtes encore capable de parler sans essoufflement et théoriquement de courir sans limite de temps. Ses avantages ? Amélioration de l’endurance et combustion des graisses. À privilégier donc pour des sorties longues (jusqu’à 2h et plus), ou à respecter en compétition sur du long, notamment distance Ironman.

Z3 : l’endurance active. Idéale sur des efforts compris entre 10 et 45 minutes, elle vous permettra d’améliorer votre endurance. Et également de vous habituer à maintenir vos allures rapides de compétition (type 10km, semi marathon) pendant plus longtemps. Et ce même si un léger inconfort sera présent au niveau de la respiration et de la fatigue musculaire.

Z4 : le seuil anaérobie. Celui à partir duquel votre corps va métaboliser efficacement l’acide lactique pour palier au manque d’oxygène dans les muscles. Il vous sera ainsi difficile de parler pendant l’effort. Zone à réserver sur des blocs courts (<5’), dont le bénéfice sera une amélioration de votre capacité à maintenir une fréquence cardiaque plus basse au fil des séances.

Z5 : la zone rouge ! Et aussi pour vos yeux, votre visage… Là, vous ne parlez plus du tout, vous serrez les dents. Car vous êtes dans une optique d’amélioration maximale de vos performances et de votre vitesse, en effectuant un effort très intense sur de très courts intervalles. En gros, ne faites pas une sortie longue en Z5…

POUR RÉSUMER…

Les grands principes à retenir

Bien définies et adaptées à vos données physiologiques, les zones de fréquence cardiaque vous permettront de cibler vos allures et intensités en fonction du type de séance. Et ainsi d’optimiser votre entraînement et vos performances. Mais surtout de respecter le principe de progressivité, la majorité des coureurs ayant effectivement tendance à courir trop vite en entraînement… “Run slow, to run faster and longer.”

Bon à savoir : le principe des zones de fréquence cardiaque est bien sûr applicable aux autres disciplines, mais les FCM n’étant pas tout à fait les mêmes (souvent plus basse en vélo, de l’ordre de 5%), vous devrez ajustez vos zones en fonction (ou considérer la fourchette basse). Ce qui est par exemple possible dans votre montre GPS (type Garmin, Polar…)

Pour conclure et faire simple, retenez essentiellement les conseils suivants :
• Effectuez un test d’effort (à minima une fois par an) pour avoir la mesure la plus fiable de votre FCM.
• Privilégiez la formule de Karvonen, qui prend en compte votre FCR : %effort = %(FCM-FCR) + FCR
• Volume entraînement hebdo : 80% en Z1/Z2/Z3 – 20% en Z4/Z5 (sur base Karvonen)