PAR JEAN-BAPTISTE WIROTH
DOCTEUR EN PHYSIOLOGIE DE L’EXERCICE WTS – THE COACHING COMPANY® LE RÉSEAU DE COACHS N°1
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La survenue de blessure est un cas relativement fréquent chez les sportifs, et en particulier chez les triathlètes dont la charge d’entraînement est souvent élevée, voire très élevée.
En effet, a un moment ou un autre, la plupart des triathlètes doivent faire face à des blessures de type musculoarticulaires.
La survenue d’une blessure est la plupart du temps la conséquence soit d’un effort particulièrement intense à l’entraînement en compétition, soit d’une mauvaise posture, soit liée à un matériel inadapté ou encore lié à un accident (chute par exemple).
Les tendinopathies des articulations du membre inférieur sont particulièrement fréquentes : tendinite du tendon d’Achille, syndrome de l’essuie-glace, syndrome rotulien, syndrome de Morton, hernie discale …sont des blessures les plus fréquentes.
La prise en charge de ce genre de blessures chez les sportifs est assez complexe car cela relève de la « bobologie » du sportif : pour résumer, cela n’affecte pas vraiment le quotidien mais cela gêne considérablement le maintien d’un entraînement régulier.
Sur le plan psychologique, la survenue d’une blessure est toujours délicate à gérer, en particulier chez les triathlètes à tendance bigorexique.
La gestion d’une blessure quelle qu’elle soit doit respecter un protocole médical précis que nous allons détailler ci-après. En outre, le repos n’est plus considéré comme LA solution. Tous les spécialistes de la prise en charge des sportifs (médecin, coach, kiné…) considèrent que la reprise d’un entraînement adapté doit être réalisée le plus rapidement possible pour limiter le déconditionnement physique et la décompensation psychologique !
Quel protocole de soin en cas de blessure aigüe ?
Le premier conseil que l’on peut donner un sportif blessé est de réduire sa charge d’entraînement et surtout de cesser toute activité générant de la douleur !
En effet, notre corps est très bien fait et la douleur aiguë est le meilleur indicateur qui soit pour signaler que quelque chose ne va pas. Par contre, il est tout à fait conseillé de maintenir un entraînement adapté pour peu qu’il ne génère pas de douleur.
Dans un second temps, le glaçage peut soulager le syndrome douloureux et l’inflammation souvent associée.
Dans un troisième temps, il convient de consulter dans cet ordre précis :
- Son médecin du sport pour un examen clinique approfondi et établissement d’un diagnostic précis
- Faire des examens complémentaires si le médecin le juge utile (radiographie, échographie, IRM …)
- Consulter son ostéopathe si besoin. En cas de chute lourde à vélo ou à pied, le « passage au marbre » par votre ostéo est particulièrement recommandé !
- Soins de kinésithérapie si prescrit par le médecin.
Attention à l’automédication !
Les antalgiques masquent la douleur, effaçant en conséquence le signal de la douleur, permettant ainsi le maintien de l’entraînement. C’est un leurre !
Même problème avec les anti- inflammatoires (AINS ou cortisone).
Faites confiance à votre médecin du sport.
Quel protocole de soin en cas de problème chronique ?
La blessure chronique ou au long cours est compliquée à gérer. Le problème est souvent liée à des difficultés à établir un diagnostic précis…d’où une errance thérapeutique. L’athlète est souvent le plus à même de trouver petit à petit la méthode qui permet d’améliorer la situation.
Cela passe dans 90% des cas par un ré-entrainement très spécifique qui permet de retrouver sa liberté de mouvement en gainant, assouplissant, musclant la zone déficitaire. La hernie discale légère à modérée en est la bonne illustration : en renforçant spécifiquement les muscles para-vertébraux, on peut résoudre le problème (méthode Mézières en kinésithérapie).
Attention à la chirurgie !
Selon moi, l’opération doit être le dernier recours… après avoir épuisé toutes les autres solutions. Et il est très vivement conseillé d’avoir plusieurs avis médicaux. En effet, quand on subit un traitement chirurgical : on n’est jamais sur à 100% du résultat final ! On s’expose à tout un ensemble de problème (maladies nosocomiales, mauvais traitement, complications post-opératoires…).
Deux bonnes raisons pour ne pas se précipiter dans les bras de son chirurgien !
Pourquoi il ne fait pas se mettre au repos complet quand on est blessé ?
1) cela fait du bien à la tête
2) cela permet d’irriguer les tissus lésés
3) Votre corps à sécréter des hormones de croissance et des anti-inflammatoires naturels
4) Cela calme la douleur (endorphines)
5) Cela évite de se déconditionner et de prendre du poids
Le tout est d’adopté un entraînement adapté
Focus sur le cas de la tendinite
En natation, ce sont les tendinites de l’épaule et du bras qui sont les plus fréquentes.
En vélo, la tendinite rotulienne (sous la rotule) est classique des sur- sollicitations. Les tendinites de la pâte d’oie (intérieur du genou) et du tenseur du fascia-lata (extérieur du genou, aussi appelé syndrome de l’essuie-glace) sont très souvent liées à un mauvais réglage des cales (talon trop vers l’intérieur ou trop vers l’extérieur) ou à un système de pédales qui ne laisse pas assez de liberté angulaire.
En course à pied, la tendinite du talon d’Achille est classiquement liée à une sur-sollicitation des muscles jumeaux (mollets). Le syndrome de l’essuie glace touche est un classique des tendinites du coureur.
NB : Les « petites » tendinites font souffrir au repos et disparaissent à l’effort faible à modéré. Les tendinites sévères font souffrir en permanence, y compris au repos et a fortiori à l’effort.
Les causes
Première cause des tendinites : l’utilisation d’un matériel inadapté comme des plaquettes trop grandes en natation, un vélo mal réglé, ou des chaussures mal choisies.
En vélo, le matériel et/ou une mauvaise position sur le vélo est d’ailleurs à l’origine de la majorité des tendinites, et les articulations de la jambe sont les plus touchées (genou, cheville). Cela résulte souvent d’un problème au niveau du point d’appui inférieur (pédales) ou supérieur (selle).
Les principales causes sont :
- une selle trop haute ou trop basse
- une selle qui penche trop en avant ou trop en arrière
- une selle désaxée ou tordue (au niveau des rails)
- un cintre trop bas ou tordu
- un axe de pédale ou de pédalier tordu
- une cale de chaussure mal réglée (pédales automatiques)…
Les tendinites peuvent aussi provenir de sur-sollicitations et d’un manque de progressivité dans l’entraînement. L’exemple classique en natation est l’utilisation des plaquettes : bien souvent, une introduction trop rapide de plaquettes dans l’entraînement d’un nageur débutant peut contribuer à générer une contrainte excessive qui se traduit par l’apparition de tendinite de l’épaule.
Les tendinites peuvent aussi se déclarer à l’issu d’efforts pour lesquels le triathlète est insuffisamment préparé comme un entraînement très long ou une compétition particulièrement dure. La progressivité dans l’augmentation de la charge de travail reste encore le maître mot de la prévention. Sans progressivité, tous les problèmes anatomiques mineurs (jambe plus courte que l’autre, déséquilibre du bassin…) peuvent alors faire le lit des tendinites lorsque la charge d’entraînement augmente trop rapidement.
Enfin les tendinites peuvent survenir suite à une chute entraînant un traumatisme musculo-tendineux ou un déplacement osseux. Parmi les «classiques », on retrouve les déplacements de la colonne vertébrale ou du bassin.
Prévention des tendinites
Afin de prévenir l’apparition des tendinites :
Le matériel. En natation, pas de plaquettes avant au moins 1 saison d’entraînement régulier. En vélo, soignez les réglages relatifs à la position sur votre vélo en ayant recours à un spécialiste de l’ergonomie. En course à pied, prenez le temps de bien choisir vos chaussures de running avec un spécialiste.
L’échauffement. Il est indispensable (20-30min) surtout s’il fait froid (facteur favorisant la tendinopathie). Pour qu’une structure musculo-tendineuse fonctionne de manière optimale, il est nécessaire que la température augmente pour que le complexe articulation/muscle/ tendon soit prêt à l’effort.
En natation, commencez donc vos séances par 5-10 minutes de mobilisation articulaire. Insistez sur le renforcement des muscles rotateurs externes d’épaule (infra-épineux et petit rond) réalisant l’action opposée aux muscles propulseurs (grand pectoral et grand dorsal) pour améliorer leur efficacité « frénatrice ».
En vélo, moulinez sur le petit plateau pour soulager vos genoux ! Evitez de rouler en force, et préférez la vélocité (cadence de pédalage > 70 rpm en côte et >90 rpm sur le plat).
En course à pied, débutez vos séances par 5-10 minutes de mobilisation articulaire. Ensuite, essayez de réduire l’impact de la foulée en déroulant le pied, voir en attaquant par la pointe de pied.
L’hydratation et la nutrition. Les tendons sont des structures fibreuses très sensibles à l’état d’hydratation de l’organisme. Il convient donc de s’hydrater très régulièrement par petites quantités pour prévenir les tendinites, en particulier en période estivale !
Il faut s’hydrater suffisamment en eau toute la journée (un signe simple, les urines doivent être claires). La quantité dépend de l’activité et de la température (entre 1,5 et 3l). Si vous êtes sensible aux tendinites, essayez de réduire les aliments acidifiants comme, l’alcool, le café ou le thé noir, la viande rouge, les fromages, les produits laitiers de la vache, les sodas, les sucreries. A l’inverse, il convient d’augmenter les aliments alcalins c’est à dire principalement les fruits et les légumes, les graisses riches en Oméga-3 (maquereau, sardines, saumon oui huiles de colza et de noix).
L’hygiène bucco-dentaire est importante en prévention et pour le traitement d’une tendinite.
Les experts sont unanimes pour dire qu’une mauvaise hygiène dentaire (caries ou autres) est une porte d’entrée d’infections pour l’organisme. Un bilan dentaire annuel est indispensable !
En outré, sachez que la plupart des « boissons de l’effort » ont un pH très acide, les dentistes conseillent aux sportifs de bien se rincer la bouche avec de l’eau pendant l’effort, et de se brossent les dents au retour de l’entraînement.
Posturologie et ostéopathie. En cas de déséquilibre postural, les chaînes musculaires sont mises en tension de façon déséquilibrée. Avec l’entraînement, un surmenage s’instaure jusqu’à pouvoir déclencher des lésions tendineuses. La « porte d’entrée peut être une cicatrice proéminente, une asymétrie oculaire ou mandibulaire, un problème de statique au niveau des pieds…
Consultez un posturologue pour entamer un travail de fond. Et n’hésitez pas à consulter un ostéopathe à intervalle régulier, en particulier si vous avez chuté récemment. C’est le passage au « marbre » du sportif ! Si vous êtes sujet aux tendinites, soyez extrêmement progressif dans l’introduction de nouveaux matériels et prenez soin de vos tendons à des fins préventives.
Si la tendinite apparaît, alors il convient de ne pas « forcer » sur la douleur. Celle-ci doit être appréhendée comme un signal d’alarme qui doit vous inciter à « lever le pied » et à adapter votre entraînement !
Conclusion
En matière de traitement de la douleur, il faut savoir écouter son corps et le signal qu’il vous envoie. Plus que la douleur en elle-même, c’est son évolution qui doit guider le sportif et son entourage. La reprise d’un entraînement adapté peut être relativement rapide mais doit faire appel au bon sens !